Traductions – Christian Encarnación

Traduction par Miguel Ángel Real

El sueño roto de mi madre

He olvidado mi nombre
se ha perdido
entre las heridas de mi nacimiento.
Soy una cosa hecha
pero la mayor parte del tiempo
siento que no existo
y he llegado a creer que soy
el sueño roto de mi madre.

Le rêve brisé de ma mère

J’ai oublié mon nom
il est perdu
parmi les blessures de ma naissance.
Je suis une chose faite
mais la plupart du temps
j’ai l’impression de ne pas exister
et j’en suis venu à croire que je suis
le rêve brisé de ma mère.

 

****

Enero

No se le escribe a enero por el frío
no es motivo para que el invierno
tenga tantos poemas.
Se le escribe a enero
por la ausencia.
Poco le importa al cazador el frío
cuando lleva
la piel del oso puesta.

Janvier

On n’écrit pas au mois de janvier à cause du froid
ce n’est pas une raison pour que l’hiver
                                        ait autant de poèmes.
On écrit au mois de janvier
                         à cause de l’absence.
Le chasseur ne se soucie guère du froid
quand il porte
la peau de l’ours sur lui.

***

A.C.

Hace aproximadamente 1.500.000 años
el hombre descubrió el fuego
quién sabe cuánto tardó en dominarlo.
Imagino al Homo Erectus
fascinado con la belleza letal de la ignición
y es lo mismo que pasa
cuando te observo.

No sabemos cuándo
el homínido aprendió a hablar
abandonó los gruñidos y se distanció
del lenguaje animal.
Cuánto habrá tardado en dominar las palabras
con balbuceos
y a lo mejor el mismo miedo
con el que aún escribo tu nombre.

A.C.

Il y a environ 1 500 000 ans
l’homme découvrit le feu
qui sait combien de temps il lui a fallu pour le maîtriser.
J’imagine l’Homo Erectus
fasciné par la beauté létale de la combustion
             et c’est ce qui se passe
quand je te regarde.

Nous ne savons pas quand
l’hominidé apprit à parler,
abandonna les grognements et s’éloigna
            du langage animal.
Combien de temps cela a dû lui prendre pour maîtriser les mots
avec des balbutiements
et peut-être la même peur
avec laquelle j’écris toujours ton nom.

******

Espectador

Las hormigas taladran la carne
del gusano que yace bajo mis pies
podría detenerlas
pero acabaría el espectáculo
de la muerte doblegando la vida.
¿Acaso Dios hará lo mismo?

Spectateur

Les fourmis percent la chair
du ver qui gît sous mes pieds
je pourrais les arrêter
mais cela mettrait fin au spectacle
de la mort qui fait plier la vie.
Dieu fera-t-il de même ?

***

Después de todo, nada

Después de suspender
la tierra y las aguas
de invocar la lluvia
y reinventar el fuego
nos desconocemos
como los niños desconocen
la angustia y el fracaso
y nos miramos como los viejos
ven pasar los días
con la resignación de la fe.
La nulidad devora
lo que una vez creímos
y somos el recuerdo
tras la herida.

Après tout, rien

Après avoir suspendu
la terre et les eaux
invoqué la pluie
réinventé le feu
nous ne nous connaissons pas nous-mêmes
tels des enfants qui ignorent
l’angoisse et l’échec
et nous nous regardons comme des vieillards
qui regardent les jours passer
avec la résignation de la foi.
La nullité dévore
ce que nous croyions autrefois
et nous sommes la mémoire
derrière la blessure.

Photographie: Pedro Burgos Montero

Christian Encarnación (Santo Domingo, République Dominicaine, 1997). Poète et photographe autodidacte. Il prépare un diplôme en informatique à l’Universidad Autónoma de Santo Domingo. Il a collaboré à des magazines internationaux. Il a participé en tant qu’invité à la dixième semaine internationale de la poésie à Santo Domingo. Son recueil de poèmes « Ausencia del vacío » a été récompensé par le prix de la jeune poésie
Zacarías Espinal 2021. Il écrit actuellement d’autres livres de poésie et d’aphorismes.