[choix de poèmes, extraits de L’autre nuit]
entre les hauts arbres ce ciel :
disons un radiateur éteint
les dieux batraciens sèment
leurs baisers de sang froid
douceur morose grise panique
racines de ton ombre
amarrées à mon corps
fragments d’os mares sans leur ciel
champ de ruines napalm routes brûlées
ville déserte ce grain de lumière
bouche à sa poussière l’amputée dort
tenant entre ses mains un moignon à vif
(telle la cigarette se consumant seule)
tête de vieux rat baiser sur
mes côtes cassées noirs
ces rideaux paradant à la façon
des linceuls
ne reste de ton corps qu’une vaine cérémonie
aime le ver de terre––le crucifié
dans l’apparent silence une rose dans l’eau
décombres des vases bruissements
macadam fêlé porcelaine
insectes d’or leurs fines armures séchant au soleil ouvertes
suintantes fourmis ça grouille déjà
sur le bitume brouillard matin
chat
feuilles de menthe fraîches fougères
rongeant le corps des fenêtres
une troupe de corbeaux bouge
comme un cirque monotone
cette carcasse de voiture délestée
de ses roues ses vitres rouillant
comme un soleil d’herbes
les murs n’ont plus de saison plus d’assise
des assiettes s’éternisent sur les toits
dans l’ombre soeur des mulots
ouvre le suaire humain
museau de la bête en moi
dont le linge maladif
éponge nos nuits
[extrait de Fragments des temps d’aphasie]
***
regard noyé larmes du cochon cages hormones synchroniser sperme ses fleurs insémine son âme bouger-non impasse se lever se baisser chier grossir petits tombés dur ce sol aigus d’enfants-groins les cris tremblent nus frêle lueur du placenta trouble lumière matin au couteau puis ça fracasse les crânes des petits tête toute cassée sur béton les plus chétifs les autres couper les queues leur mort proche crochets cisailles se tordre en vain gémir dans la nuit
[extrait de Chute : matériaux]
***
il n’y eut bientôt plus que ce sommeil rassis
pour celui qui fut nommé Langlois
ne pouvant fuir les grumeaux noirs
l’hiver des bêtes
l’abîme triste du sang
la neige est devenue brûlante
les arbres bricolés comme des cercueils
le loup pris l’image du frère
l’homme devint le servant d’un blanc labyrinthe
l’amante le perdit
dans la brume épaisse
demeure l’abreuvoir
où gît l’image enténébrée d’un cheval
[extraits de Venant d’un pays obscur]
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Pour me présenter brièvement :
J’ai publié les textes suivants : Idiome (roman, aux éditions Maurice Nadeau, janvier 2012), Limbes(suivi de) Ronces (récits/romans, éditions Maurice Nadeau, mars 2016), Les cérémonies fanées, Grand Prix de Poésie Joseph Delteil 2017 (édité par La Revue Souffles/Les écrivains Méditerranéens, avec une préface de Christophe Corp), Décombres (novellas, éditions de L’abat-Jour, collection Lumen, novembre 2021), Le sacrifice du géomètre (nouvelles, éditions Sinope, collection Hors sentier, décembre 2022), Fragmentations – d’un corps (poèmes), avec Sophie Patry, plasticienne et photographe – éditions de La page blanche (avril 2023), Solidité des lumières (poèmes), éditions de La
page blanche (décembre 2023).
Né en 1968, j’enseigne la philosophie. Des nouvelles et poèmes ont paru en revues (Triages, Souffles, Hopala, Empreintes, Mots à maux, Wam!, Lichen). Je contribue régulièrement à la revue L’Ampoule des éditions de L’Abat-Jour et suis l’un des rédacteurs de la revue de poésie et de littérature La page blanche – dans la quelle je publie des notes centrées essentiellement sur les relations littérature / poésie / philosophie.