L’omniprésence des points de diverses espèces ne doit pas occulter les ressources d’autres signes de ponctuation, comme celles des tirets, qui sont encore dans une relative jeunesse, comparativement à d’autres. Largement utilisés pour introduire de subtiles gradations spatiales et pauses temporelles ou servir de manière plus fonctionnelle de « porte d’entrée » aux parties dialoguées ou de barreaux d’échelle à d’éventuelles énumérations, le cadratin est le plus long des tirets et dans cet extrait, Panizza en fait un usage résolument expressif. En morcelant sa phrase déclarative et nous obligeant ainsi à des micro-temps d’arrêt, on se retrouve à la lecture dans le même état d’oppression que le personnage qu’il fait parler (ce halètement est d’ailleurs si bien suggéré que le « dit-il » au milieu de la phrase se révèle superflu). Pour consigner l’usage singulier de ces signes, j’ai choisi de les appeler tirets d’essoufflement (que nous pourrions également dénommer tirets pneumatiques).
« Je — serais — ve — nu — plus — tôt, dit-il, mais — il — y — avait — tell — ment… »
Oskar Panizza, Histoire de lune (Circé éditeur, Strasbourg, 1990, p.105)