Fabien Sanchez

Play Brisure

Tenues entre leurs serres
Et jetées dans les nuées,
Se brisent toutes fatigues.
Grâce ajourée de
Ce qui touche
A son heure,
Toujours dernière
La ténèbre païenne
Et le jour chrétien
Ne se déchirent plus l’horizon,
Mais l’épousent,
Et s’accusent en lui,
Pour le briser.

 

 

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Soir Bashung

Terre promise, redis-moi ton nom.

Errances dans les ronces,
essors vers les clartés
de ce qui sort du soir.

Benzodiazépines sur canapé,
et mystique dissocié du mot crise.

Assises sans nicotine ni lyrisme,
Bashung en boucle dans le jour muet,
De ses mots, pénétré,
Elvire, Volutes, Happe

J’ai mis du temps à
Laisser entrer le vent dans mon être.
Comme il balaie bien, soulève, courbe !
Comme il pousse dans le dos
Du réduit de soi
Jusqu’à Montevideo,
Du croisement des Hébrides
À la chair libérée de l’épine.
Tomber tant de fois de son haut.

Se contenter désormais
De beaucoup de ce peu
D’esprit confortable
Dans le soulagement d’airain porté
Au corps trop émotif.

Le ciel toujours
Présent dans cette folie la plus
Clandestine
Du secret non délivré.

Terre promise,
Ne me redis pas
Ton nom.

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Stances depuis une chambre d’hôtel en écoutant Johnny Hodges

Rien ne m’est sûr que la chose incertaine
François Villon

Les îles à la dérive Hemingweinnes,
La route de Cabriola Malcolm Lowrienne,
Le Tokyo Montana Express Brautiganesque,
Le transsibérien où se trans-prose le jeune Blaise,
Les blessures du cœur rousseauiste,
Et les griffures sentimentales à l’endroit
De la carcasse épuisée de Georges Perros.
J’y songe.

Enfin, ma chambre d’hôtel que je voudrais à l’année
Où j’écoute Johnny Hodges,
En m’avouant enfin que jamais je n’ai eu
La bosse du moindre commerce,
Hormis celle, jadis, des hommes.
Mais cette bosse est devenue blessure
Jamais refermée même par temps de jazz,

Et dans le for, dit intérieur,
Une voix annonce qu’il est temps de se cacher ailleurs,
Car si je ne m’avoue pas vécu, c’est que je ne me sens pas encore vaincu,
Fumant l’une derrière l’autre
Des cigarettes sur Echoes of Harlem,
Quand Oliver Nelson renchérit avec Johnny Hodges,
Et que je ne veux plus craindre d’être envahi par l’Autre :
Cheval de Troie de ma cité intérieure.

Mais là,
Me pique comme un dard
Ce rappel frileux de Gide :
Qui dit mysticisme, dit mystification.
A quoi j’oppose une autre assertion :
Qui dit réalisme, ne dit pas réalisation.
Ces deux natures de l’être,
Mystique et réaliste,
Sont malencontreuses,
Et depuis toujours éprouvées,
Mais est-ce un mal d’être davantage
Mystique que dévot de la raison ?
Rien ne saurait être vrai,
Et ce manque remplit de sa vérité
Mon moi mensonger hypertrophié
Qui se voudrait clocher.

Sagesse folle :

Je me suis tant ennuyé
De m’être sauvé des autres,
Qu’à nouveau
Je désire me perdre en eux.