Arnaud Rivière Kéraval – ANTHEMS

Photographie: Arnaud Rivière Kéraval

ANTHEM I

Deux coups. Tu es mon énigme. Un âge sans nom, un nom sans âge. C’est toi les circonvolutions labiles. Jamais tu ne perceras les antres de ton apathie. Rouvre, sors, s’il te plaît ! Pourquoi toujours franchir le tumulte des peines et fuir vers le champ insondable de tes ardeurs ? Désastre, mords mes chairs de feutre incolore, romps mes artères assassines. Toi aussi, va-t’en, avant mes sujets de satin. Honte sur vous, toi là-haut. Non toi là, reviens, oublie les méandres de l’avantage moral, mesquinerie que ce stratagème adultérin ! Non, avance, touche les soupirs factices. Quoi, j’ai dit factice ? Ce mot est un… Arrête. Revenons à toi, toi là-bas, toi ce multiple soleil qui calme mes rougeurs, toi – je ne sais pas qui tu es.

ANTHEM II

Dans ce sable antique, coquillages intrépides, tu traverses des souffles anodins, stries rigides, repousse-les. Dans ce sable antique, mes yeux ont enfanté des corps calibrés, enjoués, peints de sueur irisée, seins arides, peau fertile. Stupide aliéné, soldat craintif, mon ami, reprends le détour qui suinte vers les malaises assidus. Continue toujours et tombe. Petit soldat de clairvoyance, aime ou la chute. Elle brûle la tête, rafraîchit les sens. Triste est ma vue qui se lamente de ces couleurs opaques. Triste est le rose qui perle au fond de tes sentes traversières. Soldat éclairé, ne reviens plus, les cous ont tari, la sève espère encore des myriades de secondes, mais on est mort ici, je ne vis plus sans l’armure, sans un, sans toi.

ANTHEM III

Deux points mats rejoignent mes visions satinées. Corps insoluble, l’eau se pare de tes dorures, courbes chasseresses, elles bravent les grands sommeils, les grands tacites, elles privilégient les bris de lumière qui ensevelissent ce corps redondant. Boucle filante, tu lui survivras. Dors esquisse créature, soupire tes sanglots renaissants, écume tes joies incertaines, brutales, elles t’enlèvent la vie, je reprends ta vie, ton corps de frissons saccadés, courants de cils éventrés, le beau n’est pas de mon royaume. Peur ? Les prières de démons fratricides vont aussi loin.

Mais toi, tu exècres le pur indigo des trépassés, tu applaudis la vie, elle traverse tes surfaces infléchies de part en part, comble les ombres vides, tu jouis de ce statut infaillible, elle te protège, enveloppe tes sens de tactiles vertiges. Vertige est ton aura, vertige est mon supplice.