Chaque année, des mots disparaissent du dictionnaire car ils ont cessé d’être usités par le peuple français et les peuples francophones.
Mais nous, les poètes, nous ne sommes pas tenus d’entériner ce processus, au contraire. Nous sommes en droit d’aller contre, c’est même notre désir.
D’abord, il y a de l’honneur à restaurer l’usage des mots perdus : ainsi, ils ne le seront pas pour tout le monde ! Par ailleurs, certains mots qui existent gagnent parfois du sens, voire un autre sens, à être modifiés. Enfin, certains mots, qui n’existent pas, s’imposent on ne sait trop comment à l’oreille et à l’esprit.
Dans le sillage de Rabelais, de Michaux, de Queneau, de San Antonio, de Novarina et de tant d’autres, contre le conformisme et l’appauvrissement de la langue, autorisons-nous à la création et à la re-création / récréation langagière !
Le comité de rédaction
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Rémy Leboissetier
Entonymes
GÉOGROLOGUE [ʒeogʀolɔg]
Monstre terrestre, dévoreur de cartes.
« Les géogrologues mappent le monde. » (Rémy Leboissetier, Présence de l’Univerre)
HOUKALUMET [ukalumɛ]
Fumer le houkalumet, variante de houka et de calumet, composé d’un bec d’ambre, d’un réservoir en verre et fourneau en pierre.
« Indra se tourna tout à coup vers moi et me demanda, à travers un nuage de vapeur rose : « Avez-vous déjà fumé le houkalumet ? » (Alistair McBullett, Voyage en Bizarrabie)
INDICTIONNAIRE [ɛ̃diksjɔnɛʀ]
Base de recensement des informateurs de la police. Fam. Consulter l’Indictionnaire.
« J’avais refusé d’apparaître dans l’indictionnaire, mais l’un de mes amis me dit que j’y figurais et que j’étais plutôt bien noté.» (Dylan Maublanc, Blanche-Neige et les sept nymphes)
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Jean-Jacques Brouard
Transmotations et forgeries…
abrutilité, n.m.: bêtise violente qui n’est pas totalement inutile.
« En état de légitime défense, l’abrutilité de mon client, honorable retraité plusieurs fois cambriolé, ne peut décemment lui être reprochée. » Force de loi, Maître Minard-Nacker, avocat au barreau de Marseille, éditions Sedlex, 2015.
albatroce, n.m. : oiseau monstrueux dont la blancheur est terrible.
« Les marins, éblouis par la nuée d’albatroces, s’enfuirent en poussant des cris d’orfraie. » Pêcheurs d’Irlande, Peter Toil, éditions Westward, 2022.
amouron, n.m. : amour poison pour les chauds lapins.
« Belle, intelligente et volcanique, mais tenace, insatiable, capricieuse, rancunière et jalouse, la comtesse Ameline de Glondafond était, à tout bien considérer, un véritable amouron. » Liaisons calamiteuses, Lucas Hanowa, éditions O, Capoue, 1907
Rémy Leboissetier
Entonymes
Dangénérosité [dãʒeneʀozite] n. f.
État de personnes qui se sentent excessivement redevables envers autrui et donnent sans compter, insoucieux de la dépense.
« Il y a une certaine dangénérosité à trop faire l’aumône : je me retrouvais totalement à cours de liquidité, aussi nu qu’au premier jour de la vie. »
Ahmed Al-Majhid, Providence est mère de surdité.
Exclamousser (s’) [ɛksklamuse] v. pron.
Se faire valoir bruyamment, sans retenue.
« Mon cousin Jacques, devant les femmes, avait pris la fâcheuse habitude de s’exclamousser à tout propos et se glorifier de mille inventardises*. » (* voir ce mot)
Eugène Romblard, Mon cousin Jacques.
Funambulancier, ère [fynãbylãsje / fynãbylãsjɛʀ]
Le funambulancier est appelé dans les cas d’extrême urgence, qui imposent de prendre tous les risques : il peut alors se transporter par voie routière, maritime ou fluviale ou même par les airs.
« Le métier de funambulancier est trépidant, mais parfois comicaze* ! disait-il en rigolant.» (* voir ce mot)
Alfred Bourbonnel, Le Cirque de la vie.
Rémy Leboissetier
Entonymes
Agloutonner (s’) [aglUtOné] v. pron.
On trouve chez Alphonse Daudet « s’agourmandir », vocable exquis. S’agloutonner propose un sens voisin : on peut s’agourmandir en solitaire ; il est en revanche inconcevable de s’agloutonner sans s’agglutiner.
« Mon voisin avait créé une association d’ogres, lesquels venaient s’agloutonner chez lui tous les mardis, se goinfrant du matin au soir. »
Tanguy LE HORNU, Passe-plat.
Bananalité [bananalité] n. f.
proprt. État de la banane. Plus communément : lieu commun ; exotisme frelaté.
« Hier encore, tu pouvais m’étonner. Aujourd’hui, ton petit jeu de séduction est d’une pitoyable bananalité. »
Lynda EVANGELISTA, Le Bréviaire du sybarite.
Caporéalisme [kaporéalism] n. m.
Dictature du réel, tyrannie des apparences.
« Ceux qui appellent un chat un chat ne sont en vérité que de mornes greffiers souffrant de caporéalisme ».
Alexandre BARNOLDY, Nom de non !
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Jean-Jacques Brouard
Tautogrammes
Un tautogramme est un énoncé dont tous les mots ou presque (noms, adjectifs, verbes et adverbes) commencent par la même lettre.
Tautogramme en BA
Barbotage balèze
Une bachelière bancale profitait du baby-boom pour faire banquer trois cent balles à des banquiers en gardant leurs bâtards dans une bastide du Bassin parisien.
Pour balancer un maximum de bâtons à bâbord, elle faisait aussi banquer pour la bagatelle un barbouze balafré et barbu de soixante balais qu’elle invitait dans la baraque. C’était un balourd baraqué, un ex du bat d’Af’, spécialiste du ball-trap avec de l’or en barres dans son barda, un nostalgique du baroud, du battle-dress et du bazooka qui aimait batifoler en bagnole avec des bataves, bavasser avec des baigneuses, baratiner des bas-bleus, batifoler avec des bas-ventres et faire la bamboula avec des bagasses… Bavarde, badine et bien balancée, la banban le faisait bafouiller : il n’avait pas de bagage, même pas le bachot et il trouvait le bagout de la bambine vachement bath, il en bavait, la vieille baderne, et il banquait, le balluchon. La ballerine le menait à la baguette… Elle avait la baraka…Elle batifolait des heures entières à barguigner sur la baise, jouant la bayadère avec le barbon, lui promettant des bacchanales à s’en lécher les babines, mais c’étaient des balançoires et, lui montrant son balconnet, elle lui offrait des baisers de baladin du septième bar et lui, à force de baver, de baguenauder, de batailler et de batifoler avec la ballerine, le babilan, il en avait les bras ballants ; il bâillait, balbutiant, le banjo en bandoulière, et – badaboum ! – basculait sur la banquette, abattu, et « bâille-bâille ! ». Alors, elle lui fouillait les basques, à la vieille barrique, et lui barbotait son bas de laine. Le babouin l’avait dans le baba : elle avait le bakchich !
Après une balade au pays des Babars, il se réveillait et faisait du bazar : elle le laissait barrir, puis le baratinait pour qu’il bouge sa barbaque et se barre en bagnole avant que les banquiers ne rentrent à la base.
***
Rémy Leboissetier
Entonymes
Rénovicieux, se [ʀenɔvisjø] [ʀenɔvisjøz] adj.
En politique, désigne un partisan du renouveau, mais qui se présente sans programme nettement défini. FAM. Opportuniste.
« Ces volontaires du changement ne sont que des harangueurs sans arguments, des réformateurs perversatiles*, des rénovicieux !»
Maxime BARBERO, Le Journal du mutin.
Scéminariste [seminarist] n.m.
Jeune élève apprenant les règles de l’art dramatique et codes de mise en scène dans une voie de total dévouement à la cause des producteurs de cinéma et réalisateurs de films.
« Nous avions réuni ce matin-là tous les scéminaristes qui devaient jurer de leur fidélité au cahier des charges de la production et faire acte d’obéissance à l’équipe de réalisation. »
Steven PITCHBERG, Le Synode du Synopsis.
Toporrentiel, elle [tɔpoʀɑ̃sjɛl] adj.
Effusion subite, panique et sonorifique*. SPECIALT. Un rire toporrentiel. (de † Roland Topor, artiste).
« À entendre les accès de rire toporrentiels qui provenaient de la salle voisine, nous aurions pu nous croire à la noce, alors que nous revenions d’incinérer Tante Maritza. »
Arsiné BERBERIAN, Papiers d’Arménie.
Vulgargariser (se) [vylgaʀgaʀize] v. pronom.
Se montrer fier de sa trivialité, se délecter de ses pires bassesses.
« Comment pouvait-il se vulgargariser de la sorte, ce hâbleur, sans se prendre un coup de poing dans sa gueule ? »
Bernard VENTRATERRE, À la dérive.
Zizanihiliste [zizaniilist] n.
On trouve chez Verlaine le mot « riendutouttiste », équivalant à nihiliste ; il appert que le zizanihiliste ne fait rien du tout qui n’engendre d’abord la discorde et réduit à néant tout effort de discussion.
« Le zizanihiliste ne fait partie d’aucun parti, mais se mêle de tout. Pour mieux emmêler le monde ! »
ANONYME, Traité de zizanihilisme, ou d’extrême confusion.
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Rémy Leboissetier
Mimonymies
ACADÉMIE — Cercle d’amis, généralement décatis, qui se jouent la comédie.
ACARIÂTRE — Parâtre ou marâtre : cris et tracas… Ah, quel âcre caractère !
ACCESSOIRISTE — Rentre au soir essoré, toujours un peu triste…
ACCOINTANCES — Accords intenses (qui coincent, selon les circonstances).
ACCOUTUMANCE — À tout coup, dès que l’actu commence…
ACCROC — À cor, à cri… Ça craque encore !
ACIDITÉ — A droit de cité.
ACQUIESCER — Assez de crises encaissées…
ACRIMONIE — État critique du moine en mal d’harmonie.
ACROBATES — Peuple semi-nomade des Balkans, parlant le serbo-croate.
ACUITÉ — D’un accent suraigu.
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Jean-Claude Goiri
Mots A l’envers
Grommener
A l’origine : se promener en grognant.
Par extension dans le langage courant : se plaindre d’une situation dans laquelle on s’est engagé.
Juridique : écrire une plainte dénonçant une plainte.
Ampoulade
1.- Acte plein d’emphase et d’exagération.
2.- Mayonnaise verbale additionnée de gestes et de démonstrations servant à assaisonner une conversation ressentie comme trop banale.
Petiloquent
Caractère d’une personne qui voit et pense petitement tout en l’exprimant avec grande éloquence.
Branche de l’espèce des « donneurs de leçon » qui veulent imposer un savoir tiré de leur seul ressenti sans pour autant avoir vécu les faits et pensées qu’ils déblatèrent.
Courci
Parcours le plus long entre un point A et un point B.
Le courci est emprunté par les flâneurs de tous ordres avides d’errance et de découverte voire de perdition.
Les « courcistes » sont souvent qualifié de « poètes », terme péjoratif dans la bouche des interlocuteurs passionnés de vitesse.
Défarcir
Gastronomie : retirer délicatement la farce d’un plat cuisiné au scalpel.
Journalisme : acte de renier le sens comique ou burlesque ou cocasse d’une situation afin de le rendre dramatique aux yeux de la société et provoquer ainsi une dépression générale laissant libre cours à une manipulation.
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Rémy Leboissetier
Entonymes
Népotinisme [nepotinism] n.m.
Dictature du commérage qui s’exerce
au profit d’un milieu familial corrompu.
« Mes voisins étaient spécialement cancaniers et franchement
déplaisants : ils répandaient sur vous de fausses rumeurs en les
propageant au sein de leur propre famille, dont les ramifications
s’étendaient à travers la quasi-totalité du village. »
Ólöf Kristjánsson, Cancans & Carcans
Orfièvrerie [ɔʀfJɛvʀəʀi] n.f.
PROPT. Fièvre de l’or.
EXT. Attraction irrésistible pour les métaux précieux.
« Obnubilé par les quelques paillettes qu’il avait trouvées,
Manuelo fut pris d’une crise d’orfièvrerie qui ne lui laissa
plus aucun répit, draguant la rivière jour et nuit. »
Esteban CARAMELO, L’Amertume est salée.
Perversatile [pɛʀvɛʀsatil] adj.
Sujet à de brusques changements d’apparence et déviations
de caractère. Se dit de toute situation marquée par
l’inconstance de la réalité observée.
« À peine sorti de l’Anus du monde, l’Homme d’avant l’homme-d’avant
l’homme est pris au piège d’une nature perversatile. »
Rémy LEBOISSETIER, H2O ou le nébuleux destin d’Unanimus Nemo.
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Jean-Claude Goiri
Mots A l’envers
Insommeil
L’insommeil est un état naturel d’éveil de conscience du monde intérieur.
On distingue une phase d’ insommeil lent, profond et réparateur, et une phase d’insommeil paradoxal, caractérisé par le rêve.
Pour une raison inexpliquée à ce jour, l’état d’insommeil est inexistant chez les Hommes de pouvoir.
Désempromener
Action de détourner quelqu’un qui se détourne du chemin qu’on avait tracé pour lui et de promener cette personne en des endroits prédéfinis afin d’orienter sa course exclusivement autour de soi.
Citation : « Je les ai tellement bien désempromenés qu’ils ont fini par voter pour moi ! »
Craser
Broyer quelque chose ou quelqu’un par insouciance. Contrairement à « écraser », craser met l’accent sur l’inconscience de l’acte.
Note d’un psychiatre : « Le craseur a souvent lui-même une personnalité crasée. Le crasement étant donc complètement intégré dans son inconscient, on peut dire que, paradoxalement, il déréalise cet acte en le répétant à l’infini ».
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Conte
Chacun scie chez soi du bois d’abois,
des laisses, des lambeaux laids, des lombelles à air, des fraises faussées,
des boulons courts au long cours, des chariots d’argiles aux oreilles sales,
des salops agiles, du miel en paille, des genoux dépliés, des chaises trouées,
des sons qui sonnent comme personne, des enceintes à pets, des sonnettes à reluire,
et combien de mètres encore d’essuie-tout-ou-rien…
…mais au moins, malaxons ensemble ces petites sciures de bouche dans de l’oxymel
pour en faire une pâte à papier qui fera sonner nos heurts.
Alors, prenez vos aises et vos anses, des lunettes qui disent vrai, pour voir,
ce qu’elles cachent en dessous, car, comme dit le prophète aveugle :
« Puisque rien jamais rien ne vaut
S’essuie qui dit vrai ou faux
Derrière les lunettes qu’il faut. »
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Rémy Leboissetier
Entonymes
Intimidité [ɛ̃timidite] n.f. *
Sentiment de crainte lié au dévoilement de
sa vie personnelle ? (essai de définition).
* Néologisme (ou coquille ?) trouvé dans la traduction de :
Machado DE ASSIS, Le Philosophe ou le chien Quincas Borba
(éditions Métailié, Paris, 1997)
Judadaïsme [ʒydadaism] n.f.
Mouvement artistico-religieux qui se veut
sans doctrine et appelle à la subversion
des formes d’expression traditionnelles.
« Tout judadaïste se doit de tourner n’importe quel autre
judadaïste en dérision (car tout individu se réclamant
du judadaïsme est considéré coupable de trahison.) »
Eli TZAREVITCH, Judada est Rien. Rien est Judada.
Littératurgie [liteRatyRʒi] n.f.
Culte littéraire rendu aux fictions issues des ateliers de
fabrication d’œuvres romanesques labellisées (vives
émotions sentimentales & hauts frissons psychologiques).
ADJ. Littératurgique.
« Toutes ces remises de prix s’entourent d’un
cérémonial littératurgique qui me laisse indifférent. »
Marek SURIMI, Ici jusqu’au soir.
Matamorphoser (se) [matamɔRfoze] v. pron.
Se dit d’une personne habituellement timorée, qui se met
tout à coup à fanfaronner, voire ! à fanfaronronner *.
« À l’Hôtel Excelsior, sous l’effet des nombreux alcools qu’il avait
ingurgités, je retrouvai mon benêt de fils complètement matamorphosé. »
Rudy BARNANO, Le Daron percé.
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Rémy Leboissetier
Entonymes
Ébrièveté [ebʀijɛvte] n.f.
Griserie fugace : être en état d’ébrièveté.
« Ma tante Huguette se servait un petit verre de liqueur de prune et dodelinait de la tête, jouissant pendant quelques secondes d’une douce ébrièveté, grisée par le seul parfum de l’alcool qu’elle reversait dans la bouteille et remisait dans son placard. »
Patricia LÜND, Odeur du temps.
Fanatoqué(e) [fanatɔke] adj.
Se dit de quelqu’un qui a dépassé le stade de l’illumination et tombe dans la folie meurtrière, entraîné par un excès de zèle à caractère exclusif, généralement d’ordre religieux. « Bulbeux du tube et bombeurs de torse /
emberlifricoteurs* et fanatoqués. »
Rémy LEBOISSETIER, Saint Tintouin.
Galvaniteux, euse [galvanitø/z] adj.
Qui s’exalte pour des idées creuses, sans jamais admettre leur degré d’insignifiance.
« La voie du Tao n’est pas pour les galvaniteux de votre espèce, lui fis-je remarquer lorsqu’il voulut entrer dans le temple zen. »
Shumei YOKEMITSU, La Grande Source.
Humorosité [ymɔʀozite] n.f.
Désigne une forme d’expression artistique teintée d’humour triste, provenant d’une humeur fortement altérée.
« Excepté une lavallière noire qui ornait son col, le dandy ne s’habillait qu’en rose, ne tolérant que ces deux couleurs emblématiques de son humorosité. »
Viviane ERRARE-DRAKULA, Le Petit prince des ténèbres.
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Miguel Angel Real
Monhotton: Se dit d’un voyage à New York répétitif et sans intérêt, et qui termine par provoquer des sanglots longs.
Hutte aux pies: Construction à l’apparence fragile dans laquelle vivent en parfaite harmonie quelques oiseaux qui jacassent sans cesse, mais qui sont toutefois capables de concevoir un monde idéal.
Icare de conduite: Persévérance dans la conduite de ses propres rêves, quitte à tourner le dos à une société aux règles trop rigides; l’icare de conduite se réalise généralement en prenant son envol contre l’avis de son père.
Vole au vent: Croûte cylindrique de pâte feuilletée. C’est l’aliment préféré des personnes qui réalisent des icares de conduite
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Jean-Claude Goiri
Mots A l’envers
Enthoumiasme
Esprit de personnes possédées par les émanations malsaines.
Avidité chronique et incurable pour les mauvaises nouvelles jusqu’à pouvoir les provoquer.
Décriture
Forme littéraire consistant à décrire l’essence de tous les rouages participant exclusivement du mécanisme de l’écriture en marche.
Dans les sociétés émergentes, le développement de la décriture est probablement lié à l’apparition spontanée des miroirs dans lesquels le décrivain s’est pris d’émotion pour l’acte qu’il se surprend à voir du coin de l’œil et qui jusque-là était resté hors de son regard.
Gression
1 – État d’une marche qui n’avance ni ne recule, ni ne monte ni ne descend, mais qui évolue quand même vers un autre état distinct, et pourtant foncièrement identique à celui procédé avant l’absence du premier pas, volontairement non effectué, et pourtant inconsciemment motivé par le besoin de bouger sans pour autant le faire.
2 – Effet de rhétorique utilisé en politique pour donner l’illusion que tout change alors que ce n’est pas le cas.
3 – Action de regarder le sport à la télévision et de se trouver entièrement impliqué dans l’action sans que le corps ne suive.
(Dictionnaire Générale Aléatoire des Mots A l’envers)
***
Conte
Bouffons froids bouffés frits.
Six chiens chauds, chics et secs, cherchant saucisse chiffe, tombèrent sur chiche chienne chiffrant six chiots si chiants que les six chics virent leurs langues sans chichi sécher.
Ne sachant si dire quelle chierie c’était, les six teckels toqués chassant femelle fumante s’engagèrent en galère en galants muets.
Déçus par une mère si lasse et lâche laissant six chiots si sots tout faire sans laisse, hélas, pas déchus d’être mâles, de la bonne pâte ils prirent en mains les nains.
Quand, aiguillant les petits Sieurs dans les champs un par un, purs-sangs pourtant, la peur les prit…
…car les cabots cabotins, bien que plus glands que grands, ouvrirent une gueule cent pour cent pur leurre ; leurs dents dehors, bavant sang d’encre, sans brailler, bravant les chauds secs, calmement ils clamèrent :
« – virez vos gueules, méchants chauds chiens ! Notre dernier amuse-gueule était plus grand et plus fol que vous ! Nous fritons les bouffons et les bouffons tout frits ! Mais tellement qu’on les aime, on se fait peur nous-même ! Gare à nous bienvenus ! Fin vous guette car… comme maman le dit : si époux n’est pas papa, il est bon bonbon ! »
Il eût fallu brandir phallus, mais…
…portant la croix du croire, le froid les frit.
Le sang glacé, à brûle-pourpoint les grands fols s’enterrent sans dire un demi-mot qu’on sente.
C’est ainsi que
Six galants gisent à la chaîne,
Sans foies ni lettres,
Six queues éteintes.
Et, puisqu’il faut que tout con-
-te trimballe sa morale à la con-
-clusion, celui-ci charrie la sienne :
Sot chiche n’est pas chiffe molle.
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Rémy Leboissetier
Entonymes
ablattardir (s’) [ablataʀdiʀ] v. pron.
Avoir le cafard, fuir la lumière ; sombrer dans la dépression.
« L’ancienne star déchue devenait chaque jour plus sombre, évitait toute société, ne prenant même plus la peine d’ouvrir ses persiennes au nouveau jour… Bref, elle s’ablattardissait »
Françoise Eiffel-Argan, Bonsoir Allégresse.
barbaratiner [baʀbaʀatine] v.intr.
Péj. Se dit d’une personne étrangère qui parle dans son langage natal en y mêlant maladroitement des mots du pays d’accueil et cherche ainsi à nouer relation avec les autochtones.
« Comme je voyais l’individu rebrousser chemin, je demandais
au garde-frontière pourquoi il avait été refoulé…
— Ah, qu’est-ce qu’il nous a barbaratiné, celui-là !
se contenta-t-il de répondre, rigolard, bassement méprisant. »
Miguel-Angel Realidad, Hors des limites.
copiniâtreté [kɔpinjatrəte] n.f.
Harcelante camaraderie.
« Roger recherchait ma compagnie, sollicitait mes faveurs en permanence et je n’osais lui avouer combien sa copiniâtreté m’était horripilante. »
Marcel Duhameau, Colin-maillard.
débrusquer [debʀyske] v.tr.
Action qui consiste à chasser la colère qui réside dans le cœur de certains êtres, en leur opposant un calme olympien, hypnotique et neuroleptique.
« Ioannis, le petit apprenti, avait un don : celui de débrusquer le contremaître et neutraliser son caractère terriblement irascible. »
Antaios Oupolipoulos, Travaux renforcés.
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Jean-Jacques Brouard
Transmotations et forgeries…
judodo, n.m. : sport de combat qui se pratique la nuit pendant qu’on dort et qui permet de se défendre contre les fantasmes déplaisants.
« Malgré sa ceinture noire de pyjama, les quelques prises de judodo qu’il tente ne parviennent jamais à terrasser le monstre qui, dans son cauchemar, le poursuit interminablement à travers les rues tortueuses de cette ville infâme. » Revue Onirisme et hypnose, n° 2045, avril 2007, Genève.
illogisthme, n.m. : bande de terre qui relie deux continents d’une manière aléatoire qui échappe totalement aux lois de la géophysique.
« Aller explorer cette presqu’île ne présente pas de difficulté majeure. Le problème est d’en revenir, car l’illogisthme peut très bien disparaître sans signes avant-coureurs. » Voyages périlleux et autres errances, Eva Zion-Faroff, éditions Terra Incognita, Mururoa 2000.
cimetiercé, n.m. : pari mutuel sur trois malades engagés dans la même course contre la mort, jeu très en vogue dans les services hospitaliers.
« Cette semaine, c’est encore le docteur Bourrin du service Oncologie qui a gagné le cimetiercé dans l’ordre : 7000 € qui lui permettront, nous a-t-il confié, d’aller passer dix jours aux Bahamas. » La Gazette du CHU de Vesoul, 31 décembre 1998.
bête de sommation, n.f. : périphrase désignant un policier qui dégaine systématiquement son arme lors d’une arrestation et prend plaisir à menacer ceux qu’il arrête de tirer s’ils ne font pas exactement ce qu’il leur ordonne de faire.
« L’inspecteur Barbille est assez fréquemment dans le collimateur de l’IGN. Il frise constamment la bavure. Spécialiste des arrestations délicates, ses supérieurs le considèrent, à raison, comme une vraie bête de sommation. » Petite histoire de la police nationale, Martial Valda, Paris, 1968.
inspiraterie, n.f. : 1. Synonyme de plagiat poétique. 2. Heureuse intuition dans le milieu de la flibuste.
1 – « En publiant « Le basilic des nimbes », ce jeune poète, grand admirateur d’Antonin Artaud, risque d’être accusé d’inspiraterie. » Revue Poézigzag n°13, Mende, 2023.
2 – « Malgré l’état lamentable du navire marchand qui approchait, le capitaine décida tout de même de s’en emparer. A l’issue d’un abordage rapide et efficace, il découvrit au fond de la cale une cargaison d’or et d’épices. L’équipage se félicita de cette inspiraterie. » Flibustiers, boucaniers et frères de la côte, Adam Levant, éditions de la Tortue, Bastia, 1999.
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Rémy Leboissetier –
MIMONYMIES
Qu’est-ce que la « mimonymie » ?
Acte d’imitation
Si le terme est nouvellement formé sur la base de ses racines grecques (mimos, onoma), sa conception est ancienne, et même très ancienne si on se rapporte à sa seule fonction mimétique. Pris au pied de la lettre, qui n’exclut pas un certain tour d’esprit, « mimonymie » serait mimer le mot. Acte d’imitation, donc… Mais pas de pâle copie ! Plus que du bruit des choses dont est faite l’onomatopée, la mimonymie vise à faire de chaque
mot, au-delà des badaboum, glou-glou, miam-miam, pschitt, prout et autres tsoin-tsoin, un petit objet d’art lexical inédit, à la fois définitionnel et indéfinissable, extravagant mais cohérent, déroutant et néanmoins révélateur, subtilement déviant, souvent irrévérencieux, voire insurrectionnel puisqu’il vient troubler l’ordre établi par l’accord d’usage du dictionnaire.
A
ABASOURDIR — On s’attaque directement à la base : on abat, donc, après avoir ourdi. On hésite entre sabre et gourdin — Silence garanti.
ABBAYE — Le moine baille ; la brebis bêle ; le ciel moutonne… Quand sonne le bourdon, ça sent la cire d’abeille jusque dans la serre de l’abbaye.
ABDOMEN — Amène la manne au dôme de la bedaine.
ABLUTION — Saisi d’une peur bleue, « ablui », l’être moribond, après avoir lutté, demande absolution.
ABOMINABLE — D’un abîme innommable.
ABONDANCE — Bonde ôtée, c’est la bombance !
ABORIGÈNE — Où se ressent ab ovo une aberration d’origine, entre carbone et oxygène.
ABOULIE — Tout abus aboli.
ABRUPT — Entre rapt et rupture.
ABSOLU — Cet insoluble abcès…
ABSTINENCE — Absence obstinée de stimuline.
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Rémy Leboissetier
Entonymes
uburlesque [ybyʀlesk]
Forme de comique cruel et outrancier.
« Sale fripouille ! me cria-t-il, tandis que je lui enfonçais
en rigolant mon cure-dent dans l’oreille, je prends
note de votre comportement uburlesque. »
Nuncio Casanova, Le pal des débutants
vampyromanie [vɑ̃piʀɔmani]
Perception pathologique des corps ectoplasmiques
provoquant des impulsions incendiaires ; faire feu
de tout spectre.
« Il suffisait du moindre halo pour qu’un fantôme lui
apparaisse. Dès lors, il était impossible de la soustraire
à un acte de combustion : elle était vampyromane. »
Ingrid Utarefsson, Mes hallucinations
zygoloïde [zigɔlɔid]
Être atteint de fièvre zygoloïde, se manifestant par
des accès de rire irrépressibles pouvant entraîner
la mort par étouffement.
« De Burlesk le Vieux à Hilariote le Jeune, les cas de
fièvre zygoloïde furent nombreux, portés par un rire
d’épouvante, d’une violence extrême. »
Arnold Desgrumeaux, Traité de pathorigologie
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Jean-Jacques Brouard
Transmotations et forgeries…
claudiction, n.f. : façon de dire un alexandrin en oubliant un pied.
« Devant le jury du Conservatoire d’art dramatique, cette malheureuse claudiction était impardonnable et ne lui fut pas pardonnée. »
Paul-Xavier Desplanches, Souffler n’est pas jouer, PTO (Presses Théâtrales de l’Ouest), 1996
khangourou, n. f. : chef de secte bondissant, très difficile à suivre, imbattable à la boxe et qui, ivre de pouvoir absolu, a de grandes poches.
« Créateur et chef de l’Eglise du Sacré Dernier Moment, Jean-Sébastien Goupil s’est toujours comporté comme un vrai khangourou, pugnace, craint de tous les adeptes et habile à les dépouiller de leurs biens.»
Revue « Veille républicaine » n°123 , « Clubs, sectes et groupuscules », Paris, 2002
méharakiri, n.f. : expédition suicidaire à dos de chameaux dans le Sahara.
« Mal préparée, cette traversée du grand erg occidental que proposait le professeur Nartsoul était une véritable méharakiri. »
Laurent Sdarbit, L’errance dans les sables, éditions de l’Atlas, Sidi Kacem, 1985
mercurriculum vitae, n. m. : cv d’un ouvrier de l’industrie chimique.
« La DRH de l’usine TrashChemicals osa demander à ce manutentionnaire de trente-trois ans rescapé de la catastrophe de Seveso de produire, lors de son entretien d’embauche, son mercurriculum vitae. »
Jérémie Litan, Les empoisonneurs industriels, 2011
momifixation, n.f. : passion morbide des égyptologues pour le culte des morts qui évolue souvent en nécrophilie.
« Jonathan Laudlat, illustre descendant de Champollion qui s’était spécialisé dans l’exploration des cryptes, s’appropriait tous les sarcophages qu’il découvrait sans daigner en informer les autorités locales : une momifixation incurable, hélas, qui mit fin à sa carrière ! »
Hildegarde Barrière, Les dessous de la pyramide, Montréal, 1952
onirixe, n.f. : bagarre dans un cauchemar.
« Bien qu’il ne se soit pas battu le soir précédent, il se réveilla ce matin-là avec un œil au beurre noir… Sans doute un gnon reçu pendant l’onirixe du milieu de la nuit. »
Adam Lévape, Le souper des assoupis, Fribourg, 2007
pertourber, v. trans. : distraire quelqu’un en lui posant un problème difficile à résoudre et dans lequel il va s’enliser pour de bon.
« Les habitants de ce village de Sologne prenaient un malin plaisir à intervertir les pancartes des sentiers du marais, ce qui pertourbaient les randonneurs venus d’ailleurs. »
Guide des balades campagnardes, association « Les Arpenteurs d’ici », Limoges, 1920
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Rémy Leboissetier
Entonymes
rafistuler [ʀafistyle]
Pratiquer de vaines opérations d’étanchéité.
Tentatives de colmatage. fig. Attitude fuyante, en
politique. FAM. Noyer le poisson.
« Le porte-parole du gouvernement rafistulait les faits
à la façon d’un Polichinelle déconcertant. »
Maxime Barbero, Le journal du mutin
sylphilitique [silfilitik] adj. et n.
Génie aérien atteint de maladie vénérienne.
« Je suis l’enfant de l’air, un sylphilitique,
un rêve devenu cauchemar. »
Victor Urgo, La légende des cycles
tergibouler [teʀʒibule]
Souffler le froid et le glacé. Réfrigérer, paralyser.
EXT. User de nombreux détours pour «geler» la
situation (se pratique généralement en mars).
« Cessez de tergibouler, cher confrère,
et entrez chaudement dans le vif du sujet ! »
Brigida Bardoletti, Cent rancunes
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Rémy Leboissetier
Entonymes
obsidérant(e) [opsideʀɑ̃/ɑ̃t]
Qui exerce une complète fascination et vénération.
« Rôdant canaille autour de l’aven obsidérant. »
Mathurin Trullier, La traversée du désir
panachever [panaʃəve]
Conclure en beauté. Coup d’éclat final.
« Continuez ainsi, me répétait le maître…
Vous êtes en voie de panachèvement. »
Bruce Wallace, Les désarrois de l’élève Topless
quémandibuler [kemɑ̃dibyle]
Mendier de manière implorante et intrusive, en
jouant des maxillaires. ext. Réclamer avec trop
d’insistance ; importuner, tarabuster.
« Pour forcer la compassion des bonnes gens,
ces gueux quémandibulaient leur pain,
dans un concert de clic-clac insupportable. »
Marie-Jeanne Soupolet, Jusqu’à l’hallali
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Miguel Angel Real
Crucifiction (n.f.)
Récit imaginaire issu de la volonté de perpétuer des croyances dépourvues de toute pertinence historique et dont le style se caractérise par une succession de phrases qui tentent tant bien que mal d’étayer des dogmes inconsistants car indiscutables.
Marmythe (n.f.)
Récipient où l’on élabore des récits fabuleux.
Vertsans (n.m.)
Partie de la montagne spécialement aride.
Nui (n.f.)
Partie de la journée qui vous porte préjudice.
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Jean-Claude Goiri
Mots A l’envers
Défarcir
Gastronomie : retirer délicatement la farce d’un plat cuisiné au scalpel.
Journalisme : acte de renier le sens comique ou burlesque ou cocasse d’une situation afin de le rendre dramatique aux yeux de la société et provoquer ainsi une dépression générale laissant libre cours à une manipulation.
Petiloquent
Caractère d’une personne qui voit et pense petitement tout en l’exprimant avec grande éloquence.
Branche de l’espèce des « donneurs de leçon » qui veulent imposer un savoir tiré de leur seul ressenti sans pour autant avoir vécu les faits et pensées qu’ils déblatèrent.
Prodiastination
Tendance à s’acharner à faire le jour même ce qu’on pourrait tout à fait remettre à la nuit.
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Rémy Leboissetier
Entonymes
luciféérique [lusifeeʀik]
Se dit d’une ambiance attirante et néanmoins
suspecte, non dénuée de romantisme.
« Je sens comme une présence d’ammoniac,
l’odeur est luciféérique. »
Rémy Leboissetier, Il faut bien que genèse se passe
mémorandomiser [memɔʀɑ̃dɔmize]
Faire remonter des souvenirs, évoquer des faits
fixés dans la mémoire de manière hasardeuse.
FAM. Battre la campagne.
« Huguette n’exerçait plus de contrôle sur sa mémoire ;
ses souvenirs restaient cependant justes, mais anachroniques
et enchevêtrés : elle mémorandomisait. »
Patricia Lünd, Odeur du temps
noircissisme [nwarsisism]
Attention exclusivement portée au côté obscur de
soi-même. PATHOL. Admiration morbide et délectation
perverse de sa propre image.
« Dès seize ans, je concevais des théories complexes issues
de mondes idéaux et, d’une manière générale, me démarquais
par un farouche individualisme qui présentait divers
intérêts, dont celui de cultiver un envoûtant noircissisme. »
Rémy Leboissetier, Dents dehors, dents dedans
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Jean-Jacques Brouard
Transmotations et forgeries…
authentiquité (n.f) – 1.- pièce de musée garantie d’origine. « Nul ne peut nier que la Vénus de Milo est une authentiquité. » Léon Champeau, L’art de la Grèce, Sarlat, 1890.
2.- vérité admise par tous depuis l’aube des temps. « Pour tous les hommes, la nature inéluctable de la mort est une authentiquité. » Revue Obsèques pour tous, n°666 (décembre 1999), Bruges.
bourreaucrate (n.m.) – haut fonctionnaire fanatique qui n’hésite pas à exécuter ses administrés par esprit de système. « L’efficacité et la pérennité d’une dictature reposent sur le corps constitué des bourreaucrates. » Vladipir Moutine, Ce que je crois, Moshtrou, 2007
casanovice (n.m.) – séducteur à ses débuts. « Lorsque Maupassant, en mai 1866 – Il n’a que seize ans – séduit la sœur de Louis Bouilhet, il n’est encore qu’un casanovice. » Le héros de l’éros, Vitaly Bidineux, Paris 1968.
diamentalité (n.f.) – état d’esprit qui se caractérise par le goût du luxe et l’attirance pour les pierres précieuses. « La diamentalité est indéniablement l’une des perversions les plus courantes du pouvoir. » La politique du pire, Mac Yavel, Bruxelles, 1952
exercystite (n.f.) – envie constante qu’éprouve un professeur de donner des exercices à faire à ses élèves. « L’inspection de l’Éducation nationale ne dispose actuellement d’aucun remède pour guérir l’exercystite dont souffrent aujourd’hui bien des enseignants. » Sachants et apprenants, n° 1563 POF (Pédagogie Officielle Française), 2021
groupustule (n.m.) – petit groupe de gens nuisibles et dangereux qui infecte le corps social. « La BIP (Brigade d’Infiltration Profonde), la crème de la crème des unités d’élite de la police nationale, est le seul remède efficace contre les groupustules. » n°36 de la revue Allo police ?
hippocampeur (n.m.) – cavalier qui dort sous une tente (avec son cheval) en milieu marin ou sous-marin. « Tous les ans, lors des grandes marées, la commune de Sablemou, en pays d’Ouille, accueille sur son littoral de nombreux hippocampeurs. » La Gazette de Basse-Mornandie, septembre 1964.
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Jean-Claude Goiri
Mots A l’envers
Ampoulade
1.- Acte plein d’emphase et d’exagération.
2.- Mayonnaise verbale additionnée de gestes et de démonstrations servant à assaisonner une conversation ressentie comme trop banale.
Bougri(e)
Adjectif désignant une personne ratatinée par un caractère ayant la faiblesse de se croire supérieur à ceux qui font l’effort de ne vouloir devenir personne d’autre que quelqu’un sans pour autant vouloir briser la vie des autres.
Les autocrates et autres dictateurs sont les exemples parfaits d’un caractère bougri.
Courci
Parcours le plus long entre un point A et un point B.
Le courci est emprunté par les flâneurs de tous ordres avides d’errance et de découverte, voire de perdition.
Les « courcistes » sont souvent qualifié de « poètes », terme péjoratif dans la bouche des interlocuteurs passionnés de vitesse.
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Rémy Leboissetier
Entonymes
insalubricité [ɛ̃salybRisite]
Appétit sexuel morbide, aiguisé par l’absence d’hygiène.
« Je me retrouvai, dans des conditions d’insalubricité
volontaires, entourée de fétidichistes qui venaient
renifler mon odeur, beaucoup trop fade à leur goût. »
Anaïs Fox, L’impur contre-attaque
joviabilité [ʒɔvjabilite]
Humeur joyeuse, au caractère durable.
péj. Gaieté artificielle, optimisme béat.
« Dans chaque situation, même la plus triste, mon cousin
Jacques affichait une joviabilité à toute épreuve, une forme
de ravissement qui avait le don de m’exacerbériser. De fait,
je le mordis plusieurs fois. »
Eugène Romblart, Mon cousin Jacques
karatéchumène [kaRatekymɛn]
Instruit dans la foi chrétienne et la pratique de l’autodéfense.
« Pour les futurs prosélytes destinés à porter la bonne
parole aux êtres vivant dans le vice et la corruption,
il est important de suivre jusqu’au bout les règles
de notre karatéchuménat. »
Pierre-Albert Furet, Mission impassible
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Jean-Jacques Brouard
Tautogrammes
Un tautogramme est un énoncé dont tous les mots (noms, adjectifs, verbes et adverbes) commencent par la même lettre.
Tautogramme en A
Une aventure atroce
Sur cet atoll atlantique, l’agrégat d’autochtones avait comme atout atypique un aréopage d’amazones avenantes, d’aventurières affriolantes et d’amoureuses androlâtres toutes amincies, anorexiques de bon aloi, alléchantes, des algazelles allégées, des allèges bien accastillées, aptes à amadouer l’amiral le plus austère : un amas d’aguicheuses angéliques mais amorales, ad hoc pour les apprentis avides d’aventures qui rendent amok, d’amitiés ardentes avec des allumeuses amusantes, d’apartés aquatiques avec des anonymes amphibies et appétissantes…
Arsène, l’amorphe agent de l’amirauté, affecté aux avirons et aux amures, avait abordée Annabelle lors d’un apéro dans un alcazar argentin : dans les allées où les asphodèles étaient agités par les alizés, ils avaient agréablement appris à s’apprécier. Elle lui avoua ne pas avoir – non, affirmation absurde ! – d’aversion pour lui : elle admirait son aplomb, son air apache, ses arpions et son allant. Au point qu’elle était amourachée déjà et qu’elle avait envie de l’avoir à elle jusqu’à l’anéantissement de son âme. L’amour appelait un accord pour arranger un appariement ailleurs dans l’avenir, une accolade ou autre, alors qu’elle n’aspirait qu’à l’arnaquer.
Annabelle, l’amène arpète, aronde athlétique, ayant l’art d’attirer, d’assujettir et d’abuser, attifée en aristocrate accorte avec tous les affiquets appropriés, l’attendait à l’aube sous un araucaria. Il arriva en autorail par cette aurore d’automne. De l’auvent, il l’aperçut sous l’arbre et l’accosta sans ambages. Aveuglé par son aura, appâté par l’affleurement des aréoles apparents sous l’aéré angora, appas alambiqués de l’amour qui l’avaient azimuté. Afin d’abréger, ils s’aimèrent, mais, ab ovo[1], cet acabit d’aguicheuse était une abomination : elle abhorrait les androgynes, les acolytes et les allogènes. Elle allait l’anéantir, son alter ego, avec des arguments ad hominem, des armes adéquates, l’adresser ad patres sans l’avertir.
L’aspirant, autosatisfait par quelques acquis en algol, alchimie, algèbre et anatomie, se prenait pour un autodidacte, mais n’était qu’un aliboron. Non content d’aligner les âneries andante, il arborait des affections qui l’affaiblissaient : comme il souffrait d’acné, son amante lui administra une dose d’acqua-toffana qui ne l’acheva pas mais l’abrutit et le rendit aboulique, anosmique, « agueusique » et acariâtre.
Après des années d’aversion mutuelle, pour se venger des adultères qu’elle accumulait, il l’amena dans son appartement dans un arrondissement loin des artères et de l’agora et l’assomma avec un anspect. N’ayant pas d’arthrite, l’adonis lui en asséna des allers et retours en abondance sur les abattis et l’amocha affreusement au point de la laisser aphasique et amaurotique.
Trop altier pour s’abstenir des assemblées sur l’acropole, il assistait à une assise quand il fut aperçu, assimilé et alpagué par un argousin de classe A, un as de l’autopsie, adulé de ses associés. On l’accusa d’abus de tout acabit, on l’aligna comme un albigeois et on l’acheva en l’abîmant abominablement.
[1] Lat. : depuis l’origine
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Jean-Jacques Brouard
Transmotations et forgeries…
La transmotation, c’est la transmutation des mots, une transmutation qui peut être morphologique, sémantique, étymologique… C’est un processus alchimique qui permet de créer un mot mutant dont la quintessence est un catalyseur de l’imagination.
La forgerie est plus artisanale, mais tout aussi puissante.
Forgerie est un mot tiré de l’ancien français forgeure qui désigne l’action de forger qui vient de forgier. En ancien français forgier signifie forger, mais aussi façonner et fabriquer, donc faire quelque chose avec art, quelque chose d’artificiel, donc quelque chose qui n’est pas naturel. Ce qui explique que le mot, devenu, grâce aux Normands, forgery en anglais, finisse par signifier contrefaçon. Ainsi, la forgerie lexicale, c’est l’action qui consiste à créer un mot qui n’existe pas à partir du minerai langagier – dans ce cas, son sens est libre, même si l’auteur en propose un de son choix – ou bien à contrefaire un mot qui existe – dans ce cas, le mot forgé ressemble au mot originel mais à un détail près et, bien sûr, son sens en est détourné…
Quoi qu’il en soit, la mutation et le détournement opérés par ces deux pratiques convergentes créent un écart poétique censé enflammer l’imaginaire.
Sept transmotations et/ou forgeries
académilicien (n.m.) – agent supplétif de surveillance de la langue. « Cela fait trop longtemps que les académiliciens ont infiltré l’école et l’université. » Le Klaxon anarchiste, Nantes,1968.
bouchon-oreille (n.m.) – cylindre de liège qui permet d’entendre le murmure des anges quand ils viennent prendre leur part dans les chais. « Avant même de l’avoir goûté, l’œnologue savait que le vin était bon par le bouchon-oreille. » Jaja-Mag, 2020.
calamytheux (adj.) – se dit d’un personnage infortuné ou d’un fait historique tragique qui a fait, fait ou fera l’objet d’un récit ennuyeux à lire. « Je ne veux pas enflammer le débat, mais il faut tout de même avouer que Jeanne d’Arc est calamytheuse. » Dom Rémy, Ma France, PAF (Presses Atypiques de France) 1952.
démitrification (n.f.) – destitution des évêques rendus à la vie profane sans couvre-chef. « Le nouvel archevêque de Paris a procédé à la démitrification de trois évêques gaullistes en présence du Maréchal. » revue L’Eglise éternelle, 1943.
divinification (n.f.) – miracle consenti par Dionysos pour changer le jus de raisin ou la piquette en pinard correct, en vin fin voire en ambroisie des Dieux. « Dans l’espoir d’une divinification, tous les chevaliers de la Treille sacrée vinrent assister au rituel ancestral de la guindaille dans la grande cave du château. » Chroniques de la Dive Bouteille, Jean Nêcluze d’Aifyolles, 1760
euthanisie (n.f.) – action de se donner la mort par overdose de pastis. « Après le décès d’un client du bar Le Petit Jaune sur le Vieux Port, le débat sur l’euthanisie est relancé dans la région PACA. » La Gazette de Marseille, 2015
fainéhantise (n.f.) – crainte obsessionnelle de ne rien faire. « Après une vie de dur labeur, à l’heure de la retraite, il souffre désormais de fainéhantise. » Nasser Nada, La Vie passive, Ajaccio, 1999
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Miguel Angel Real
âmetriste: Variété de quartz dont la vision prolongée provoque chez l’individu un état d’intense abattement.
lamartinet: Instrument de châtiment corporel qui permet de se flageller en écoutant des vers d’un romantisme suranné. Certaines personnes osent encore revendiquer leur utilisation au XXIe siècle.
livrerté: Effet provoqué par la lecture.
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Rémy Leboissetier
Entonymes
fanfaronronner[fɑ̃faʀɔ̃ʀone]
Produire avec sa gorge un bruit sourd pour attirer
l’attention, se faire voir et entendre d’autrui ; plus
généralement : action qui désigne une telle affectation,
mêlant le geste et la voix, souvent maladive.
►mythoxicomanie, délire borborythmique.
« Devant les femmes, mon cousin Jacques se mettait aussitôt
en spectacle : il faisait des mines, gesticulait, susurrait, sifflotait,
gloussait, roucoulait, se livrait aux pires fanfaronronnades. »
Eugène Romblart, Mon cousin Jacques
globésité [globezite]
Expansion des corps sphériques. spécialt. Globe
terrestre : développement incontrôlé des activités
humaines à la surface de la Terre et situation de
surpoids général, notamment démographique.
« L’Univerre souffrirait-il de globésité ? »
Rémy Le boissetier, Présence de l’Univerre
hydrolâtrie [idʀolatʀi]
Culte rendu aux sources et génies aquatiques.
« Jennifer prenait au moins quatre douches par jour, quand
elle ne se baignait pas en surplus. Elle était à ce point attirée
par l’eau, cette ondine, que je la qualifiais d’hydrolâtre. »
Benjamin Fontaine, L’écume des nuits
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Jean-Claude Goiri
Mots A l’envers
grommener
A l’origine : se promener en grognant.
Par extension dans le langage courant : se plaindre d’une situation dans laquelle on s’est engagé.
Juridique : écrire une plainte dénonçant une plainte.
insommeil
L’insommeil est un état naturel d’éveil de conscience du monde intérieur.
On distingue une phase d’ insommeil lent, profond et réparateur, et une phase d’ insommeil paradoxal, caractérisé par le rêve.
Pour une raison inexpliquée à ce jour, l’état d’insommeil est inexistant chez les Hommes de pouvoir.
malgame
1.-Mélange d’individus homogènes se distinguant par la nécessité de ne pas se distinguer.
Réunion dans un même corps social d’unités de recrutement similaire ayant des objectifs communs.
2.- Maladie sociale se déterminant par l’embourbement d’un individu dans la même mélasse qu’un autre sans pour autant savoir pourquoi. Le malgame peut générer un effet de masse et conduire toute une société à des extrémités allant à l’encontre de ses idéaux avant l’apparition des premiers symptômes.
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Rémy Leboissetier
Entonymes
capistonner [kapistɔne]
Faire bénéficier des meilleurs appuis et plus vives
recommandations.
« Soyez sans crainte, jeune homme, vous êtes capistonné. »
Henri de Sabaillon-Verny, Le Cierge est sous l’escalier
daltonalité [daltɔnalite]
Anomalie de l’ouïe, qui entraîne une confusion
des intervalles dans l’échelle des sons.
« Ne criez pas ! Je ne suis pas sourd ni daltonal ! »
Herbert von Garoyen, Mémoires d’orchestre
effervanescence [efɛRvanesɑ̃s]
Bouillonnement d’idées, entre pétulance et
pétillement. Agitation intellectuelle entraînant
une sensation de perte de présence physique.
« J’étais parvenu à un tel degré d’effervanescence
que je pensais avoir triomphé de la matière,
comme sous l’effet d’une pilule d’invisibilité. »
Krida Ben Arouf, Porté disparu
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Jean-Claude Goiri
Mots A l’envers
alentournure
Expression et combinaison de signes manifestant la volonté de désigner un mot sans jamais réussir à l’exprimer. L’alentourneur se caractérise par une volonté essentielle de communication avec toute personne qui l’entoure.
L’alentournure nécessite donc la capacité à utiliser tous les matériaux sémiotiques des alentours du mot non émis ainsi qu’une connaissance approfondie de ce terme.
craser
Broyer quelque chose ou quelqu’un par insouciance. Contrairement à « écraser », craser met l’accent sur l’inconscience de l’acte.
Note d’un psychiatre : « Le craseur a souvent lui-même une personnalité crasée. Le crasement étant donc complètement intégré dans son inconscient, on peut dire que, paradoxalement, il déréalise cet acte en le répétant à l’infini. »
désempromener
Action de détourner quelqu’un qui se détourne du chemin qu’on avait tracé pour lui et de promener cette personne en des endroits prédéfinis afin d’orienter sa course exclusivement autour de soi.
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Rémy Leboissetier
Entonyme
blaguenauder [blagnode]
Se promener, généralement en famille, flâner en
évoquant les anecdotes du clan ou du groupe,
ranimant les sujets de plaisanterie traditionnels
des uns et des autres.
« Mes vieux aimaient blaguenauder au
parc municipal après le morne repas dominical. »
Noémie Lelièvre, La Malapprise
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Rémy Leboissetier
Entonyme
armorigéner (s’) [armɔʀiʒene]
Réprimander quelqu’un, dans le but d’un meilleur
amendement.
« Il n’est pas rare que les Bretons de Paris se sermonnent
mutuellement et décident, au terme de leurs invectives,
de s’armorigéner, c’est-à-dire de revenir sur leurs terres
pour retrouver un air plus sain. »
Yves Nédélec, Le Baragouin des bécasseaux
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Luc Baron
A ma clepsydre…
A ma clepsydre il était plus que temps. J’enfourchai mon célérifère à cadre de bois et patinai diligemment, écrapoutissant ici et là quelques paresseux hexapodes. Peu ou prou il me restait une chance d’arriver en temps et en heure, voire à tout pile. Nonobstant mon probable essoufflement et les ânonnements afférents, d’aucun me serait reconnaissant d’avoir tenu promesse. Encore devais-je espérer que cette ardeur à l’élan me permettrait d’arriver sans coup férir, pourvu qu’elle ne soit pas endiguée par le clabaudage impromptu d’un digitigrade safre de mon mollet, un engorgement circulatoire, ou les tribulations que me causeraient une anicroche inopinée. Ces pensées digressives me ralentissaient-elles ? Que nenni ! Je crapahutais tout de go, peu soucieux d’écorcher mes semelles, prêt à payer du sarcocarpe, à fulminer mes alvéoles pulmonaires, plus assidu à officier qu’un extatique missionnaire, pourvu que le ministère fut rempli. Et, enfin, je touchai au but ! J’étais rompu ! Pauvre écaflote délaissée sous un tapabord mal-seyant. Ils étaient là, l’air placide et absent de ceux qui se gobergent, peu captivés par mon exploit et ses conséquences sudatoires, bien peu reconnaissant de mon application à satisfaire le contrat et leur potentielle félicité. Je les avisai de ma contrariété. Ils trigaudèrent ! » Eh quoi, s’esclaffèrent-ils, si tu n’étais empreint de misonéisme , tu serais venu en taxi, à nos frais, et sans fatigue. Alors cesse donc de caqueter ! » J’en fus marri, contrit, et quasi décimé. Je me consolai comme je pus, murmurant en mon for » Encore heureux que le ciel soit clément .. Il aurait pu s’appeler Marine ou Jean-Marie .. »
12/10/22
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Jean-Jacques Brouard
Discordance
Le gaillard était de visu un mâche-dru remarquable qui ne rechignait pas à engouleiller des pots tout en s’ébaudissant avec des péronnelles de passage. Sa moitié était une prône-misère qui passait la sainte journée à rognonner dans tous les coins quand elle ne faisait pas la pecque devant la boîte à images.
Il est vrai que le grand forfante avait son côté gobe-mouches, mais il était poterne et pourvoyant, peu contredisant en tout cas.
Elle, c’était l’inverse : elle était blasonneuse et fâcheuse. Elle s’atêtait à tout et tumultuait à contre-poil. Difficile à raccoiser, elle ravaudait à messéance.
Lui complaisait in poculis pour la paix du ménage, se brandillait pour s’accoiser, ébaubi par tant d’acrimonie. Pour ce roger-bontemps, toutes ces fatrasseries étaient canulantes !
Jean-Jacques Brouard
Au restaurant
Ah, le client en avait son soûl de chamboler. Il avait une forte envie de brifer et reluquait convoiteusement du côté de la coqerie. Il y avait là un gâte-sauce d’allure bourguignonne qui paraissait capable de mitonner une blanquette de veau sans consulter de grimoire.
Émerillonné par l’idée même de s’embourrer le sac avec des mets entichants, il posa son séant sur un tribuchet et commanda une flasque de pinuche. Il s’engouffra une lampée… Ah, quel déboire ! C’était du chasse-cousin ! De la ripopée ! Il endêvait grave !
Il héla aussi sec le tavernier, qui rappliqua fissa en godillant. C’était un foutriquet fort civil, mais traîtreux, qui lui soutint mordicus que le jaja provenait d’un vignoble bordelais assez coté dans les coteaux.
Epalourdi par une telle doublerie, le client perdit sa quiétude et s’endiabla brusquement. Le minaud allait morfler : une avalanche de sobriquets tartignolles vint lui entartrer l’oreille interne et lui encrasser la comprenette. Et le lourdingue enjôleur retourna penaud à ses barriques comme un poiloux affligé…
Jean-Jacques Brouard
Le mieux-disant
Il avait l’art de s’impatroniser partout. Il esbroufait, le fanfaron, engaulait la galerie, emberlucoquait son monde.
Pantophile affirmé, il s’inventait une parentaille illustre pour embabouiner le bourgeois et débagoulait avec un tel brio que l’auditoire s’abalourdissait torpide et s’infatuait du pasquin.
C’est qu’il en avait de la jactance, le hâbleur ! Il y allait à l’improvisade sans s’embarbouiller : un maître du dégoisement, un as de la faconde, une épée du verbe ! Et quand on le tarabustait, il contre-piquait du tac au tac. Quel entregent !