MIRAGES
Des hommes allaient parmi nos aînés, cargos
à la dérive dans d’inutiles nuits, les mains pleines
d’éternité. Dans chaque port l’imposture, nous errions
d’île en île (de la mer viennent écueils, tentations).
À leur traîne un sillon, verbe austère, rouille
et cuivre. Et qui aujourd’hui pour poursuivre
le chemin sur lui déjà se refermant ?
LES AMIS
Derrière les bocks et la fumée nous enfourchions
bais ou blonds les lourds chevaux
du souvenir, pendant une nuit sans reflet (celle
qui contient les larmes) et l’obscurité gagnait
à mesure que s’éclairaient les rires,
en épaisseur mais le présent c’est l’heure
qui sonne et le retour sur le pavé froid, dégrisés
et tout le chemin à faire en sens inverse.
LE REPRÉSENTANT
Il va de porte en porte avec les souliers
lisses, il va, infatigable et le sourire toujours
à renaître, malgré la méfiance derrière le judas
(car l’accueil n’est souvent qu’une porte qui claque),
en costume sombre et dans sa sacoche elle attend,
précieuse marchandise, toute la panoplie
de la vie éternelle, c’est elle inlassablement
qu’il traîne, continuant sans jamais se décourager,
d’étage en étage, marche après marche il va
tous les jours, tous les jours de sa vie.
***
Né en 1977 en Meurthe-et-Moselle, Samuel Martin-Boche vit et travaille à Nevers. Il est l’auteur de La ballade de Ridgeway Street (Polder 186, Décharge / Gros Textes 2020). Présent depuis 2017 dans une quinzaine de revues de poésie, numériques et papier.