Traduction : Paula Mendes Coelho
O homem que caminha ao sol
Diz-se que há dezassete espécies de figos na ilha. Era bom que se conhecessem os
nomes, diz para si o homem que caminha ao sol.
Walter Benjamin, Imagens de Pensamento
Ter-se-á sentado à sombra
de uma árvore antiga
e o seu pensamento
foi tomado pela incerteza
apesar do dia claro
e do cheiro das flores
ardendo na Primavera.
As perguntas sucedem-se
na sua mente
à hora do rigor
porque a noite ainda não veio
para o assaltar de solidão.
Ele caminha ao sol
na paisagem em brasa
os passos marcando
o percurso do seu pensamento
reflexo côncavo da vida.
L’homme qui marche au soleil
« Il paraît qu’il y a dix-sept variétés de figues dans cette île. Ce serait bien si on pouvait
connaître leurs noms, se dit l’homme qui marche au soleil. »
Walter Benjamin, Images de Pensée
C’est bien possible qu’il se soit assis à l’ombre
d’un très vieil arbre
et que sa pensée
ait été assaillie par le doute
malgré le jour ensoleillé
et l’odeur des fleurs
qui brûlaient en ce printemps.
Les questions se succèdent
dans son esprit
à l’heure de la rigueur
car la nuit n’est pas encore venue
pour l’agresser de solitude.
Il marche au soleil
dans le paysage en feu
ses pas ponctuant
le parcours de sa pensée
creux réflexe de la vie.
***
Deixa que o vento escreva a luz
por dentro dos ramos das árvores
e os teus gestos leves
dancem no fogo da tarde
repetindo a caligrafia destas sílabas
de vento, fazendo oscilar a folhagem
não olhes para trás nem em volta
concentra-te na dança invisível
na música fulgurante que há
no deslizar dos dias.
Laisse le vent écrire la lumière
à l’intérieur des branches des arbres
et tes gestes légers
danser dans le feu du soir
en répétant la calligraphie de ces syllabes
de vent qui font onduler le feuillage
ne te retourne pas ne regarde pas autour
concentre-toi sur l’invisible danse
sur la musique fulgurante qui existe
dans le glissement des jours.
***
A luz da manhã varre a casa
como um incêndio, percorre o chão
as prateleiras, dando-lhes vida,
lá fora é o rumor da vida que emerge
os sons do quotidiano
que também entram neste poema.
E vejo-me diante da página
que não o é exactamente,
mas o écran vivo onde escrevo.
E todos os sons reclamam o sentido
A luz reconfigura as breves sombras
As estrofes trazem para dentro de si
O caos, a angústia, o desfazer da noite
E o milagre da beleza
Que atravessa esta manhã de julho.
La lumière du matin balaye la maison
comme un incendie elle parcourt le sol
les étagères, leur donnant vie,
dehors c’est la rumeur de la vie qui émerge
les bruits du quotidien
qui se faufilent eux aussi dans ce poème.
Et je me vois devant la page
qui ne l’est pas tout à fait,
mais plutôt l’écran vivant sur lequel j’écris.
Et tous les sons réclament le sens
La lumière reconfigure les ombres fugaces
Les strophes s’emparent
Du chaos, de l’angoisse, de la nuit qui se défait
Et du miracle de la beauté
Qui traverse ce matin de juillet.
***
Maria João Cantinho est née à Lisbonne (Portugal). Elle a étudié la philosophie et a soutenu une thèse en philosophie contemporaine. Elle a publié des romans, de la poésie et des essais. Elle a gagné le Grand Prix du PEN Club Portugais avec l’essai Walter Benjamin, melancolia e revolução (2020). Avec son livre de poésie Do Ínfimo, elle a remporté le Prix Glória de Sant’Anna (2017). Elle a publié diverses critiques dans des revues et a traduit des œuvres littéraires, dont les dernières sont Après le Tremblement de Jean Portante et Féline de András Petocz. Elle est membre l’Institut du Centre de Philosophie et du Collège des études juives et de philosophie contemporaine, Centre Emmanuel Lévinas (Sorbonne Université). Elle est membre du PEN Club Portugais et appartient à l’APCL (Association Portugaise des Critiques Littéraires). Elle est publiée dans des anthologies de poésie françaises, roumaines, hongroises, espagnoles. En 2024, elle a publié un recueil en France : Avant cela il y avait l’ombre (Éditions Jacques André).

