Françoise Sé

LA TRILOGIE DES OISEAUX

Mai 2020

Tout ira bien
La sérénité des arbres
Dans les courants venant du sud
Les oiseaux, là, sur les fils
Regarde, la vie continue !
L’affolement des maîtres
Derrière le rideau, ces maîtres du monde
Théâtre des mensonges et des lois scélérates
Ces marionnettistes, ces illusionnistes
Entre deux tours de passe-passe
Comme ils paniquent, comme ils paniquent
Regarde bien !
Le silence des villes
Dans la noirceur brumeuse des coulisses
Au-delà des cloisons, un peuple en dormance
La peur ne rend-elle pas docile ?
En réalité le feu couve, je te l’affirme
Le peuple en dormance bientôt ne formera qu’un
Et le rideau tombera, le rideau tombera !
La sérénité des arbres
Dans les courants venant du sud
Les oiseaux, là, sur les cimes
Regarde, le printemps s’en vient
Une nouvelle vie commence
Et rien ne sera comme avant.

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Septembre 2021

Demain l’automne

Voici venues les migrations
S’attroupent, s’agitent et jubilent
Ces colliers infinis d’oiseaux
Préparant leurs ailes
À l’appel des grands départs
Et le ciel à nouveau sera désert
Alors nous serons seuls, mes frères
Au creux du vide absolu
Dans le silence de l’hiver
Divisés comme jamais
Sourds et muets
Nous n’écoutons plus
Nous ne parlons plus
Cette âme qui palpite et attend
Pourtant !
Quand les baies ont mûri
Les oiseaux savent
Il faut se gaver et s’en aller
Rien ne les affole, rien ne les fige
Nous, hommes et femmes
Chape de plomb de la peur
Courbés, humiliés, étouffés
Cette toile d’araignée
Vue du ciel
Que faisons-nous
À part obéir et trembler ?
Bien sûr, les couleurs de l’automne
Vont apaiser les souffrances
Les yeux brilleront l’espace d’un instant
Nous irons aux pommes
Et les enfants s’enrouleront dans les feuilles mortes
Ensuite…
Ensuite, devant le miroir de notre solitude
La névrose d’un ennemi invisible
Dans les esprits tourmentés
À nouveau se posera la question :
De quoi l’avenir sera-t-il fait ?

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Octobre 2021

Sœur Anne ne vois-tu rien venir?
Droit devant un terrible orage, ma sœur
Préparons-nous
Ceux-là qui écoutent les tornades et les cyclones
Les volcans et les mers
Connaissent la puissance des vents
Ils sont prêts
Rien n’est plus terrible
Une hydre en perdition
Courant hurlant
Le feu de la malédiction
À trop persécuter
À trop mentir
À trop détruire
L’hydre réveille les consciences
Sa fin approche
Les âmes endormies se lèvent
Elles n’auront jamais été si nombreuses
À foison de par le monde
Que les foules sont belles
Le bonheur au cœur de la vie, ma sœur
Le peuple debout avance et libère la demeure
Les assassins du vivant et de la terre
Les tyrans de l’humanité
Dehors ! Dehors !
Maintenant que vois-tu, sœur Anne ?
Le frémissement des ailes
Tel un mirage
Mes yeux me trompent-ils ?
Je te le dis
Cet espoir au bout du tunnel
Nous n’en avons plus pour très longtemps
Les colombes et les hirondelles impatientes
Tournoient dans la lumière
Ce flot migratoire des âmes éveillées
Elles auront dormi si longtemps, ces âmes
L’oubli verrouille les portes du temps.


 

Françoise Sé, nom Internet. Tiens, ça sonne bien finalement ! Je souhaite un bonjour à la Bretagne de mon adolescence. D’origine française je vis au Québec depuis 1973, au pays des arbres, du froid et des canicules, sur la terre ancienne des « sauvages » c’est-à-dire d’un grand peuple libre. J’ai vécu 12 ans à Paris et autour, 10 ans en Bretagne (Vannes, Dinard et Rennes).
Diplômée en musique, en lettres et en journalisme, j’ai passé beaucoup de temps dans la sphère des médias. Chercheuse obsessive, rat de bibliothèque, des questions : d’où venons-nous, où allons-nous, que se passe-t-il réellement au sein de cette humanité et qui fait quoi ? Et les
réponses parfois, aïe !
Et la poésie dans tout cela ? Il y a si longtemps…